mercredi 12 mars 2008

A l'hôtel

Il y a déjà quelques jours j'ai lu un roman assez étrange d'une romancière contemporaine, Yoko Ogawa, intitulé Hôtel Iris et publié chez Actes Sud.
La narratrice, Mari, est une jeune fille de 17 ans qui travaille comme réceptionniste à l'hôtel de sa mère quelque peu tyrannique. C'est un établissement sans prétention, dans une villégiature de bord de mer. Un soir, une altercation entre un vieil homme et une prostituée vient troubler la tranquillité de l'hôtel. Mari est marquée par cette scène. Elle se débrouille pour retrouver la trace du vieillard et entrer en contact avec lui. L'homme est traducteur de russe et vit seul sur une petite île. Une relation amoureuse se noue entre le vieil homme et la jeune femme. C'est une relation forte emplie de violence et de désirs honteux. En effet, le traducteur, sous ses apparences timides, se livre en fait, dans le secret de l'alcôve, à des jeux sado-masochistes dans lesquels il entraîne l'adolescente. Celle-ci, loin d'être effrayée, découvre dans ses pratiques érotiques un plaisir insoupçonné.
Ça y est, vous allez dire : Paddy lit des livres X et est un vrai mouton pervers ! Vous auriez tort de vous arrêter à cette première apparence. Le roman de Yoko Ogawa est d'une grande délicatesse, soutenu par une écriture fine et précise. La romancière parvient bien à construire une atmosphère de malaise à laquelle le lecteur se laisse prendre. La narration à la première personne est construite à travers le regard de la jeune Mari. Impossible de se forger un jugement univoque sur le vieux traducteur : le regard amoureux de l'adolescente laisse paraître son admiration et son profond respect pour lui, alors que, dans un même temps, la perversité de ses actes et la crudité des scènes de description en font un personnage effrayant. Ce qui est le plus troublant, c'est le plaisir que ressent la jeune Mari, à tel point qu'en fin de compte, le personnage le plus ambivalent et le plus insaisissable s'avère être la jeune fille.

Hôtel Iris
Yôko Ogawa
Actes Sud, collection "Babel"
2002
Traduit par Rose-Marie Makino-Fayolle

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