mardi 5 mai 2009

Personnages

Il y a des personnes que l'on croise par hasard qui ont d'emblée des têtes de personnages. Tout, dans leur corps, dans leurs gestes, dans leurs mimiques, appellent à la narration et à la mise en portrait, comme si leur existence même faisait signe vers l'écriture du récit. Bien sûr, dira-t-on, ce n'est pas l'être de la personne qui fait le personnage, c'est le regard - subjectif, forcément - que l'on porte sur cette personne rencontrée. Bien sûr, ajoutera-t-on, il faut avoir trop lu de romans dans son enfance pour voir en chaque passant croisé dans la rue un personnage romanesque.

Pourtant... Pourtant, lorsque notre train s'est arrêté dans cette petite gare japonaise et que j'ai vu ce chef de gare dressé sur son sens du devoir, ignorant le petit chat allongé devant la porte sur la droite, j'ai aussitôt tiré sur le coude de Maître Moun, répétant : "va y, sors l'appareil photo ! je veux une photo de cette scène !" Nous n'étions pas en face et la photo, prise dans l'urgence, est mal cadrée.

Mais j'aimerais un jour lire l'histoire de ce petit homme, impeccable dans son uniforme des chemins de fer. Regarde-t-il chaque jour, chaque heure, passer les trains ? A-t-il les yeux rivés sur sa montre ? Prend-il parfois le temps de caresser le petit chat tigré ?

Il y a des personnes qui sont des personnages. A Séoul, devant un grand palais dont j'ai déjà oublié le nom, voici le frappeur de tambour. Il a un beau costume rouge satiné, un chapeau de velours, une petite jupette noire. La photo l'a immobilisé en pleine action. Il frappe avec force sur la peau du tambour coloré. Si fort que les perles de son chapeau s'envolent en même temps que son geste.

Que devient se gros monsieur lorsqu'il ôte son costume d'une autre époque ? Paraît-il si authentique lorsqu'il est revêtu d'un costume de ville ? A quoi pense-t-il lorsque, chaque jour, il revêt son costume pour jouer à la relève de la garde devant les touristes ?

Et puis, il y a des hommes qui appartiennent déjà à l'histoire qu'on voudrait lire d'eux. Voici ce Coréen qui médite en haut de la montagne de Gyongju, devant un temple bouddhiste, sous un cerisier en fleurs. Il n'écoute plus rien de ce qui l'entoure, ne voit plus rien d'autre que la montagne sacrée qui s'étend à ses pieds.

Que dit-il dans ses prières ? Est-il parvenu près du dieu ?

1 commentaire:

Placido a dit…

Ah ... la méeeeeeditation, si vous saviez ce que c'est.

bêééééé, faut pas entrer dedans